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Ne l’appelez plus Martine Aubry, mais « Lille »

Je ne vous dissimulerai pas, bien aimés lectrices et lecteurs, la sincère joie de vivre qui m’a envahi à la lecture du dernier numéro de Lille Magazine. Car cela faisait bien longtemps que je n’avais parcouru si puissante propagande. Au fil d’une quarantaine de pages ô combien délicieuses, l’on est bien forcé d’admettre que Madame Martine Aubry n’est pas simplement maire de Lille, ni reine, ni même déesse… non, Madame Martine Aubry est Lille. Métamorphosée – incroyable mais vrai – en « femme-ville ».


• Quarante pages.

110 000 exemplaires.

Quatorze photos de Martine Aubry.

Vingt répétitions des mots « Martine Aubry ».

Le directeur de publication de Lille Magazine – le magazine de la « ville » de Lille, faut-il le préciser – Aymeric Bogey n’a pas manqué sa chance de se faire bien voir par sa patronne. Depuis son arrivée à ce poste, la tâche n’a pas dû être de tout repos. Car succéder à l’inestimable et très regrettée Violette Spillebout – ô toi, repose en paix dans les limbes de l’anonymat que tu as tant désiré – n’est certainement pas une mince affaire. Cette dernière ayant tellement perfectionné l’art de la propagande municipale que l’on pouvait franchement douter de la réussite de son successeur.

Mais ceci n’est plus que du passé. Après quelques numéros d’échauffement, quelques publications hésitantes, Aymeric Bogey y est parvenu. En effet, pour cette rentrée 2010, l’homme nous a concocté un Lille Magazine qui ferait pâlir de jalousie – et je le dis sans aucune, vraiment aucune velléité de controverse – les Staline, Goebbels, Marion et consorts.

L’on pourrait par ailleurs s’arrêter à la première de couverture.

Car après cette magistrale mise en scène, que peut-on dire de plus ? Eh bien rien. Il ne sert plus à rien de dire, il ne faut plus que montrer. Montrer Martine Aubry sous tous les angles. Martine Aubry souriante. Martine Aubry rayonnante de bonheur. Martine Aubry détendue. Martine Aubry heureuse de vivre. Martine Aubry vêtue d’un modeste chemisier, humble tel Jésus de Nazareth. Martine Aubry qui sauve, par apposition des mains, à la façon des rois Thaumaturges – si seulement Marc Bloch était encore en vie ! Martine Aubry omniprésente, omnisciente, omnipotente… stop ! Ne l’appelez plus jamais Martine Aubry, car Martine Aubry n’est plus Martine Aubry. Tel que Siddhartha atteignant le nirvana, Martine Aubry a quitté le bas monde des pauvres mortels pour s’élever et devenir « Lille ». Une « femme-ville ».

 

 

Bientôt des millions de pèlerins se rendront au pied du beffroi, là où Martine Aubry a lévité neuf années durant avant de disparaître de notre monde. A ces femmes et ces hommes venus des quatre coins du monde, l’on racontera la légendaire histoire de cette femme, autrefois maire de Lille, qui, pour sauver la ville de Lille, est devenue la ville de Lille. •