Le linge sale de l’ENL

Haute trahison à l’ENL : Esteban s'exprime

• Mes cher-es camarades,

Je crois qu'il faut se rendre à l'évidence, notre directeur perd le contrôle de lui-même.

Voilà qu'il s'enfonce dans des accusations de « calomnies, trahisons, complots » à notre endroit. Alors que nous nous battons sans relâche, chaque jour, par monts et par vaux, en hypothéquant foie et santé pour propager l'idéal gonziste.

La reconnaissance de la direction s'écrit par communiqué, à coup d'insultes.

Voilà qu'il m'accuse de « haute trahison », moi, le plus ancien élève, son camarade des débuts, quand l'École Néogonzo n'était que le modeste garage de la mère de Jack. Tant de chemin parcouru ensemble pour atteindre le firmament journalistique, et voilà que le succès lui fait me planter un couteau dans le dos.

C'est maintenant clair, la paranoïa gangrène la tour d'ivoire de la direction. Sûrement que l'utilisation massive de narcotiques très puissants n’est pas étrangère aux élans complotistes du directeur. Comme cette pauvre histoire qu'il rumine sans cesse : Cœur-de-Bœuf, légèrement égayé par l'alcool, glisse malencontreusement avec un modeste ouvre-bouteille au côté du directeur. Histoire qu’il transforme en tentative d'assassinat…

Peut-être serons-nous contraints de faire interner le directeur pour soulager son psychotisme.

Bref, l'heure est grave. Il faut en finir une bonne fois pour toutes avec ce conflit permanent que la direction veut provoquer.

Alors, pour que l'été soit chaud, c'est le moment d'envoyer l'essence sur le feu...

Esteban

Communiqué de l’ENL : fin d’année, bilans et perspectives

• C’est la fin de l’année à l’ENL et il est temps d’en faire le bilan. Certes notre école de journalisme s’est montrée, une nouvelle fois, à la hauteur de sa réputation. Néanmoins la direction a remarqué une baisse de régime généralisée parmi les élèves qui ne laisse pas de l’inquiéter. Pour le dire autrement, les élèves de l’ENL ne sont qu’un ramassis de je-m’en-foutistes crapuleux et de cancrelats insolents. Or cela va de mal en pis, malgré tous les efforts déployés par la direction pour remettre ces ratés sur le droit chemin. Même la réhabilitation du Capitaine Cœur-de-Bœuf consentie par le directeur n’y a rien changé.  Ainsi il faut bien se rendre à l’évidence : à l’ENL, l’idole des élèves n’est pas Albert Londres, mais Moberg.


Dans ce contexte, si l’ENL n’a rien perdu de son prestige, c’est essentiellement grâce au travail méticuleux et patient de la direction qui, tout au long de l’année, a montré son ouverture d’esprit, sa générosité et un profond humanisme. Malheureusement ce travail, bénéfique pour tout le monde, n’est reconnu par personne, voire est contesté. Calomnies, trahisons, complots, la direction est perpétuellement menacée par de nombreuses traîtrises. Comme celle de Simon de Bavoir qui a envoyé une note aux élèves et personnels accusant le directeur d’« avoir failli à sa mission d'animation de l'ENL ». Propos lourds de conséquences, mais il y a pire : Esteban, l’élève le plus ancien, complote, en ce moment-même, pour renverser la direction. En effet, dans un mail destiné aux élèves et intercepté le 29 mai, ce petit traître déclare franchement : « Pour en finir avec l'autocratie et le paternalisme éhonté de "notre bon petit directeur", je propose une motion de défiance avec vote, et en cas de résultat positif, exécution immédiate ». Ces déclarations constituent des cas de très haute trahison. En conséquence, la direction prendra prochainement les mesures nécessaires pour faire cesser ces agissements néfastes.

« C’est peut-être la crise, a expliqué le directeur de l’ENL, mais on va pas non plus se laisser faire par ces beatniks ! » L’été promet d’être brûlant. •

La galette du roi

• La rumeur prend de plus en plus et c'est toute la communauté éducative de l'ENL (École Néogonzo de Lille) qui s'inquiète. Le Directeur de l'École, récemment accusé de prendre ses quartiers à La Laiterie de Lambersart, aurait été vu cette fois-ci, et pas plus tard que le week-end dernier, à la Gare Saint-Sauveur, lieu très branchouille de la métropole lilloise. Escorté d'un stagiaire, le Directeur voulait sûrement faire profiter le jeune sous-fifre de toute son expérience en matière de beuverie ultramondaine, tel un "type branché". Malheureusement, le poids des ans aidant, le Directeur a fini par se résoudre à la dure réalité : après quatre bières à peine, et alors qu'une bonne vieille sortie se profilait, l'homme qui couvre les marathons a commencé à tituber, cherchant désespérément son souffle. Puis, s'appuyant lamentablement sur le bas-côté, il lâcha une grosse galette en pleine rue.

Il était à peine minuit. Accompagné du regard étonné de son stagiaire, il s'en est piteusement reparti à son domicile. Le Directeur ne cesse depuis d'accuser un énième complot mafieux au sein même de l'École, qui viserait à le déchoir de son poste. Affaire à suivre. •

Communiqué de l’ENL : conseils pour lire Lille43000.com

• Afin d’aider à la compréhension des articles et brèves publiés sur Lille43000.com ‒ nous savons, oui, que tout n’est pas toujours très lucide dans ce que nous écrivons, et heureusement ! dirait notre regretté Bertoni  ‒, et même pour mieux entendre le nom de ce site, il est tout d’abord judicieux de lire ou relire « Lecture du journalisme Gonzo ‒ mode d'emploi » concocté par le Dr Thompson en 1971, dont voici un extrait (tiré de Gonzo Highway : Correspondance de Hunter S. Thompson) :

« Le journalisme gonzo ‒ tout comme le son en dimension 4 de la quadriphonie ‒ existe à divers niveaux : il est moins "écrit" que mis en scène ‒ aussi faut-il en faire l’expérience. Il ne s’agit pas seulement de "lire".

En outre, l’expérience doit être faite dans des conditions approchant le plus possible celles de la performance originelle. C’est pour cette raison que la rédaction a accepté de transmettre ces conseils de l’auteur aux lecteurs qui auraient envie de "faire l’expérience" dans les "conditions optimales". Nous vous les livrons sans commentaire ‒ & assurément en nous gardant bien de vous conseiller de les mettre en pratique.

Donc : lire tout d’une traite, à grande vitesse, du début à la fin, dans une grande pièce garnie d’enceintes, amplificateurs & autre équipement sonore approprié. Il est également souhaitable qu’il y ait un grand feu dans la pièce, de préférence dans une cheminée ouverte ‒ un feu de tous les diables, quasi incontrôlable. »

Ceci dit, cet extrait ne suffirait pas car le Dr Thompson, bien que visionnaire, n’avait pas tout prévu et surtout n’est, à notre connaissance, jamais venu à Lille ‒ ce qui est le plus délicat dans cette histoire. Voici donc cinq conseils supplémentaires :

1) (Ce premier point est un préalable pour lire du 43000 de façon générale tout le restant de votre vie) Venir à Lille ‒ si vous y êtes déjà, ce petit 1) n’est pas à prendre en compte. Une fois que vous y êtes, contactez le directeur de l’ENL, M. Jack de L’Error, qui vous donnera RDV dans un lieu que nous devons garder secret. Avoir, alors, au maximum 15 euros en poche, au minimum 3 euros. Pour la suite, surprise, mais nous pouvons vous assurer que vous n’en aurez pas fini avant sept heures de la mat’ et que vous atterrirez inexorablement sur le canapé-mousse de M. le directeur en vous demandant comment vous vous appelez.

2) Brancher la télévision ‒ si vous n’en avez pas, il va falloir y penser sérieusement ‒, de préférence un combo TV-magnétoscope de petit format, volume à fond, sur BFM TV. Si vous vous trouvez à Lille à ce moment, sur Grand Lille TV. Éviter Ruht ElKrief et/ou Wéo TV.

3) Surtout : jamais, jamais, jamais ne prendre la moindre drogue.

4) Prendre connaissance des fiches biographiques des élèves de l’ENL, auteurs des publications de Lille43000.com. Chaque texte s’aborde différemment car chaque élève a vécu une vie bizarre différente. Ceci peut paraître étrange, mais c’est toute l’histoire de l’humanité qui se joue ici.

5) Lire, précisément, 43 fois le même texte. Certes c’est rébarbatif, mais pour le comprendre il n’y a, véritablement, pas d’autre solution. Le lire 42 fois conduirait à rater l’élément essentiel, le point névralgique de tout ce bazar. Le lire 44 fois conduirait directement à l’HP. Donc attention !

Toute l’équipe de rédaction espère sincèrement que ces indications vous aideront à mieux nous suivre. Sinon, pas sûr qu’on se revoie. •

L'Enterrement de Samuele Salvatore Bertoni

• Cimetière du Verano, Rome, Tiburtina, 13 juin 2013, 12h00.

Plus de 200 personnes, réunies dans un entrelacs de joie et de peine, pour incinérer feu Samuele Salvatore Bertoni, avant de répartir ses cendres entre air, mer et terre.

Du beau linge, parmi lesquels des anarchistes et des squatteurs, de Rome à Bruxelles, des Arabes de Corfou, des Slovaques d'Oslo, des Lillois d'Aveyron, des Romaines de Sicile, de Naples... Des jeunes, des vieux, venant parfois de très loin, comme le chef de la section RG de Lille, le commissaire Compatissons, le directeur de publication de Beijing News et le rédac'chef de The Nation. Comme sa mère, aussi, d'une exemplaire digne tristesse, véritable mère courage d'une vie, et à présent d'une mort.

Ses proches, des bouts de famille, et ses amis, camarades, ont fait la route ensemble, en une caravane de crêpe noire et de klaxons internationaux...

Pas de dernier repas, pour cette mort sans préméditation (selon le Corriere della Sera du 07/06/13, une enquête a été ouverte pour déterminer exactement la nature mécanique de l'accident). Pas de poules, pas d'oies, pas de vaches, mais des femmes.

17 femmes, ex, compagnes d'un jour ou épouses légitimes, pleurent en se serrant la main (Mesdames Sophie F, Cécile, Ligia, Evolene, Silvia, LID, Irene, Iris, Zoé, Chloé, Aurelia, Cokhalouf, MHF, Fred, Chantal, Mag°0, Sophie D). Peu d'enfants, ou en tout cas pas les siens, Bertoni ayant opté très tôt (17) pour la liberté amoureuse, mixte, totale et définitive. Et pour la vasectomie, donc [1].

Un cercueil, recouvert des armoiries de la Marine Nationale du Libéria, ainsi que du drapeau noir frappé du logo des squats, sobrement soulignés d'une bannière de la bière des 3 Monts, recouvrent le corps du défunt journaliste néogonzo.

On tirera, à l'issue de la cérémonie laïque, des feux d'artifice au-dessus du cimetière, pendant qu'au même instant on tirera à balles réelles sur la façade de Casapound. Tout ça arrosé de litres de 3 Monts, à déguster entre personnes choisies, sans modération. Comme la liberté.

(Plus de 200 personnes...)

Pas de dernier repas, et pas de plage de Sète, donc, puisqu'aucune supplique en ce sens n'a jamais eu le destin saugrenu de germer dans la gueule de cet ivrogne de sagesse, pour qui le deuil, c'est avant tout dans la tête... Pas de plage, mais l'ombre centenaire des pins parasols romains, embaumés d'un jasmin estival, comme ultime demeure...

Une fin de concession sans compromis, pour un vagabond d'un monde à ciel ouvert.

(Fin de concession sans compromis, pour un vagabond d'un monde à ciel ouvert.)

Extraits Dossier de Presse :

· La Brique : « Au-delà de nos dissensions, c'est un camarade et ami qui disparaît, sans qui La Brique aurait été... très différente. Elle est un peu orpheline, aujourd'hui. On se souviendra, nostalgiques, de ses coups de gueule féroces, comme de son indéfectible amitié. On ne dévoiera jamais cet héritage. Wallah. »

· Rivarol : « On s'est resservi 3 fois de la choucroute ! »

· E & R : (sans commentaires) (mais quand même :) « Il était au B'nai B'rith, Bertoni, nan ? »

· Vlaams Huis : (en aparté :) « On a eu chaud... » ; (au micro :) « Il nous aurat pas survécus long temps, lol... alors hein, arretez maintenant… »

· Le Min.Int. (UMP) : « Une bonne chose de faite » (Cité par Libération).

· La Mairie de Naples (PD) : « Ma che schtoukazz' ! » (Cité par La Repubblica).

· Le Washington Post : « What a nice day to die, today, isn't it, Mr. Huntington ? »

· Le Huffington Post : « Sam "HuntingtoWn" Bertoni's work was an antidote to Huntington's "civilization's clash" crap idea. We'll miss him. »

· Le Fig-mag : (ont applaudit, puis craché en l'air en rotant) « On va pouvoir rebosser tranquilles. »

· Citylights.cinema : « Un partage des pellicules avalées qui nous manquera beaucoup ».

· Rouge : « Ce sale petit-bourgeois l'était bien moins que nous, par la barbichette de Léon. Un bon anarchiste est soit mort, soit au NPA ».

· Demorand, pour Libé : « à Libé, on comprenait pas sa colère... ni ce qu'il écrivait ».

· Cap'tain Cœur-de-Blues : « Qui c'est qui va me botter le cul, à présent ? »

· Jack de L'Error : « Merde, où a-t-il bien foutu ses derniers textes, pardieu ? »

· Mélissa Manchette : « Mon mari aurait aimé lire ses 43000 Stéradians... »

· Fred Lacluysse (Lille43000) : « Je suis rentrée chez moi (…) oublier que Bertoni était mort. »

· Sa dernière compagne : « Samuele ne viendra plus, maintenant. Vous pouvez rentrer chez vous ».

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Dernière minute :

À l'heure où nous mettons sous presse, la veuve de Samuele nous a fait parvenir son dernier ordinateur. Il était verrouillé par un mot de passe, qu'elle seule pouvait connaître : « 3mbrasseLesChats,ò_monAmouR ».

Les 43000 stéradians, mystérieusement disparus depuis la refonte du site (une enquête est ouverte, on vous dit), et dont le dernier billet, cet été, est paru dans les pages du Père Projo, ces 88 recensions de films sont enfin retrouvées.

Elles accompagneront les huit articles et son film sur le site de Lille 43000 nouvelle formule. Si en fouillant les tiroirs du défunt, on continue d'en retrouver, pour des films sortis avant ou après sa mort, on préviendra nos chien-ne-s d'infidèle-s lecteur-euse-s.

On met tout ça en archives sous peu, définitivement et gratuitement consultables ici, jusqu'à la fin des temps, ou la fin d'Internet...

RIP HuntingtoWn. •


[1] Il comptait racheter le groupe DurexTM, ayant appris que les fossoyeurs de la RU 486, les catholiques des labos HoechstTM, comptaient continuer le sabotage en règle de cette même liberté en s'en emparant. La Lotta Continua...